Les zones humides Méditerranéennes sont dominées par des marais temporaires et semi-permanents qui s’assèchent naturellement en période estivale. Ce caractère, dû aux températures élevées qui augmentent les processus d’évaporation et d’évapotranspiration (par les plantes) non compensés par les précipitations, confère aux zones humides méditerranéennes leur spécificité. Elles deviennent ainsi le support d’une flore et d’une faune remarquables, adaptées aux périodes d’assèchement, d’où leur importante contribution à la biodiversité. Les apports d’eau artificiels sont cependant fréquents dans les marais Méditerranéens exploités pour divers usages (coupe du roseau, chasse, pâturage, pêche). Ces interventions, essentiellement réalisées par pompage ou gestion gravitaire à partir de fleuves, rivières, réservoirs ou canaux (d’irrigation ou de drainage) sont souvent justifiées par la poldérisation croissante des zones humides, ou d'autres facteurs de modification de l'occupation des sols, qui contribuent à les déconnecter de leur bassin versant. Les apports d'eau raisonnés deviennent donc, dans bien des cas, une action nécessaire pour promouvoir les usages, la gestion durable et la préservation des zones humides.

Les scénarios climatiques pour la région Méditerranéenne prévoient une augmentation des températures et de la sécheresse estivales, avec une concentration des pluies en automne caractérisée par des épisodes pluvieux plus rares et de plus grande intensité. En zone littorale, ces modifications sont susceptibles d’entraîner une diminution de la ressource en eau en quantité et qualité (salinisation, plus forte utilisation des eaux de drainage), au moins à certaines périodes de l’année. Comment peut-on réduire les besoins d’apport en eau douce tout en maintenant les usages ? Comment peut-on moduler les entrées d’eau en hiver pour éviter les entrées d’eau salée ou de moindre qualité à d’autres périodes de l’année ? Les scénarios climatiques permettront-ils aux marais semi-permanents actuels de se maintenir sans intervention sur leur gestion hydrologique ? A quels volumes d'eau sont ou seront associés les différents modes de gestion et les divers usages ?

Mar-O-Sel est un outil de simulation disponible sur internet développé par la Tour du Valat pour visualiser l'impact de la gestion (entrées ou sorties d'eau) sur l'évolution des niveaux d'eau et de salinité des marais sous différentes conditions climatiques en région méditerranéenne. Sur un pas de temps mensuel, Mar-O-Sel calcule les volumes d'eau nécessaires pour atteindre un niveau d'eau désiré. Ces entrées et sorties d'eau, combinées aux précipitations et à l'évapotranspiration (relevés historiques et prédictions de leur évolution selon le GIEC) ont des impacts sur la salinité de l'eau souterraine et de surface, ainsi que sur les niveaux d'eau des mois subséquents. Les choix de gestions peuvent être simulés de façon interactive pour en évaluer les répercussions sur une période allant jusqu'à 10 ans. Les fluctuations de niveaux d'eau et de salinité étant parmi les principaux facteurs influençant la flore et la faune des marais méditerranéens, Mar-O-Sel permet aussi de visualiser, lorsque pertinent en fonction de la zone sélectionnée, l'impact de cette gestion sur la végétation submergée ou émergente et sur quelques groupes d'oiseaux nicheurs des marais.

Mar-O-Sel a été développé afin de contribuer à une gestion durable et patrimoniale des marais méditerranéens. L'outil est libre d'utilisation et s'adresse à toute personne souhaitant tester l'impact de divers modes de gestion sur l’hydrologie et la biodiversité des marais, notamment dans une perspective d’évolution du climat. Il existe deux modes d'utilisateurs : non identifiés et identifiés. Pour être identifié, l'utilisateur doit créer un compte avec mot de passe sans aucune autre obligation. Les avantages de ce dernier mode sont de permettre la sauvegarde de différents scénarios de gestion et d'exporter les résultats de la simulation sous format excel.

Comme tous les outils de modélisation, Mar-O-Sel est la représentation simplifiée d'une réalité complexe. Les valeurs de niveaux d'eau et de salinité résultant des simulations doivent être considérées comme relatives, plutôt qu'absolues. De même, l'eau et le sel ne sont pas les seuls facteurs influençant la flore et la faune des marais. Néanmoins, la combinaison de données sur l'hydrologie et la structure ou composition de la végétation explique une large part des variations observées dans la présence ou l'abondance de plusieurs espèces patrimoniales, justifiant l'intérêt de les intégrer à Mar-O-Sel.